Une petite au superlatif ! (FR)

PAR HERVÉ VOLPI.

La production automobile a donné naissance à des modèles qui ont marqué leur temps. Par leur popularité, ou leurs innovations technologiques, leurs formes, ou encore leur robustesse. Ford T, VW Coccinelle, Citroën 2cv, DS, Mini Cooper, Renault Espace… des célébrités incontournables.

D’autres étoiles non moins prestigieuses sont bien méconnues du grand public… Le Fardier de Cugnot, la Chevrolet Corvair Spider ou encore le Düesenberg Mormon Meteor. La chevrolet Corvair a été la première voiture équipée d’un turbocompresseur (1962), le Fardier de Cugnot est l’ancêtre de l’automobile (1769), Düesenberg est le premier constructeur à équiper ses bolides de compresseurs centrifuges (1923).

La Polo G40 est l’une de ces machines, méconnue, mais qui occupe une place toute particulière dans l’aventure automobile. Réanimé en 1978 par Ernst Fiala, alors ingénieur responsable du développement chez VW, un brevet français de Léon Lecreux, datant de 1905, donne naissance en 1982 au premier brevet allemand qui aboutira en 1983 à la fabrication du compresseur volumétrique à spirales G40. Les premiers essais sont menés en 1983 sur la Polo Sprint, une Polo Type steilheck (coach), spécialement conçue pour les tests de pistes. Les débuts sont prometteurs : équipée d’un moteur 1.9l, la Polo Sprint développe 156cv et atteint la vitesse de 207km/h. Les motivations qui conduisent Volkswagen à équiper la Polo du compresseur G sont doubles : il s’agit à la fois de concevoir un moteur suralimenté qui s’affranchisse du creux du turbo, le fameux turbo-lag, mais qui affiche néanmoins une consommation en bas de l’échelle.

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En 1985, la suralimentation par le G40 permet de sortir 115cv du petit moteur de 1273cm3, et Volkswagen annonce 5.5l/100 en consommation minimale : le pari est réussi. Elle est présentée en septembre 1985 au salon de Francfort, sous le nom de Polo GT G40.

De Septembre à Novembre 1985 sur la piste d’Ehra, Volkswagen va préparer 3 Polos GT G40 (blanches à bandes bleues, aujourd’hui exposées au VW Museum de Wolfsburg avec la Polo Sprint) et faire tomber le record du monde des 5000km en 24h à la vitesse moyenne de 208km/h, pointes à 218.

L’aventure est plus que convaincante : une première série homologuée de 500 unités, toutes noires, voit le jour à partir de Juillet 1986. Elles trouvent instantanément preneurs après du personnel VW, séduit par la volonté délibérée de commercialiser un modèle de série quasi identique au modèle du record. S’ensuivra une production de 1500 exemplaires pour l’Allemagne de 1987 à 1989 en 3 coloris (bleu, rouge et blanc) et 500 unités pour la France de 1988 à 1989, toutes noires. Une série de 40 véhicules de cup spécifiquement préparé est également proposée au catalogue allemand pour 7000DM (24 000F) de plus que le modèle d’origine. Une autre série spéciale VWMotorsport est aussi disponible au catalogue, au tarif un peu plus élevé.

Les diverses épreuves dans lesquelles Volkswagen engage la GT g40 révèle le tempérament survolté de cette fourmi rouge. Courses de Cup, anneaux de vitesse, comparatifs, le potentiel est bien là. La GT G40 fait même de l’ombre au chouchou de Wolfsburg, la Golf GTI. Les tests automobiles vont applaudir une GT G40, de série, dans les temps de la Sierra Cosworth sur circuit.

Or, le compresseur G, dont le rendement dépasse largement les compresseurs de l’époque, est sous-exploité de série. Il tourne vite, mais peut tourner encore plus vite… Les possibilités de préparations sont multiples, fiables, et rapides à mettre en œuvre. Quantité de propriétaires vont préparer ce généreux compresseur G bien au-delà de la configuration d’origine.

Peu de G40 resteront de série, et c’est là un aspect unique de cette voiture. Ne soyez pas trop surpris si un jour vous avez la chance d’en essayer une en bon état, de constater que les performances n’ont plus grand chose à voir avec les tablettes d’origine. Les performances des G40 varient énormément avec les températures d’air extérieur. VW annonce une GT G40 de série à 8s le 0-100. Les tests la mesurent de 7,9 à 8,6s. La vitesse de pointe reste limitée car le Cx n’est pas adapté et le moteur de petite cylindrée.

Fin 1990, la troisième génération de Polo fait son apparition. Il faut attendre Janvier 1991 pour que sortent les premières G40 type 3. Plus cossues que leurs aînées, catalysées pour la plupart, elles sortent en plusieurs coloris et visent d’emblée un panel de clientèle plus large que les sportifs collectionneurs des rares Type 2. La vocation sportive pure et dure de la GT G40 est un peu atténuée avec ce nouveau modèle, mais d’aspect seulement. Les G40 type 3 en jantes alliage BBS restent très discrètes sur la mécanique qui les anime et séduisent par leur look général radicalement sympathique.

Volkswagen commercialise la Type 3 dans de nouveaux pays : la Suisse, le Portugal, l’Angleterre, mais aussi les Pays-Bas, la Belgique, l’Autriche et l’Italie dans une moindre mesure. La France hérite encore d’une série d’environ 1000 exemplaires. Les 3/4 de la production qui s’élève à plus de 13000 exemplaires resteront sur le sol allemand. La Polo est très populaire en Allemagne et au Portugal, et le marché absorbe la production sans problème. En France et en Angleterre, la G40 type 3 se vend au compte goutte. Les prix baisseront pendant 3 ans. La Polo bénéficiait en France d’une forte image publicitaire à travers le concept de la fourmi, petite VW bon marché, pratique, robuste. Elle séduisait toutes les couches de population, de la jeunesse au 3e âge. La Polo G40 Type 3 n’a pas un look sportif déclaré, elle ressemble à une Polo haut de gamme, avec sigles G40 rouges, BBS, antenne panoramique et quelques options de plus. Elle a tout pour séduire au premier coup d’œil en concession.

Les jeunes qui en rêvent n’ont pas de sous, et ceux qui en avaient les ont déjà dépensés dans une Type 2. Il reste une frange inexploitée de la clientèle : les commerciaux l’ont comprise et vont la proposer à une clientèle au portefeuille garni, celle du 3e âge. Quoi de plus naturel lorsque l’on approche les 70 ans, que d’acheter une belle Polo ! Et voilà comment va s’écrire un nouvel épisode de l’histoire de la G40. Il s’est produit à peu près le même phénomène an Allemagne. On a évalué statistiquement à 15-18% le nombre de premiers propriétaires qui ont entre 50 et 85 ans. Ce chiffre a tendance à baisser au fil des années puisqu’il ya de moins en moins de premières mains. C’est un aspect très particulier du marché de la Polo G40.

Ouvrons une parenthèse et rappelons d’une manière générale que la Polo Coupé (et Coach aussi d’ailleurs), a bénéficié d’un effet publicitaire considérable et mérité autour de la fourmi depuis le milieu des années 80 jusqu’au milieu des années 90. Cette décade a rendu la petite VW très populaire dans les couches de la population. Elle est encore très rependue de nos jours, il n’est pas rare de croiser une Polo Coupé sur la route. Il en existe plusieurs fan club en Allemagne. Nombreux sont les chauffeurs de Polo G40 qui ont eu une Polo Coupé avant la G40. Le plaisir de la Polo Coupé réside dans l’utilisation d’une voiture pratique, très fiable, polyvalente, agréable à conduire, avec des sensations terre à terre pas du tout aseptisées, sensations que l’on retrouve dans la G40, mais décuplées. Et finalement une bonne bouille de petit coupé sympathique qui passe encore très bien dans le paysage automobile, et dont la forme n’a pas pris les mêmes rides que ses concurrentes de l’époque. A la lumière de cette explication, si l’on vous jure avoir vu Pépé, 82 ans, sortir sa G40 du garage, ce n’est pas un canular, mais un fait de société !

Le « loup en habit d’agneau » : cette appellation que l’on retrouve dans plusieurs pays d’Europe décrit bien la martingale qui sévit sous le capot. La type 3 est mue par le même 4 cylindres rageur que son aînée… Les mêmes causes produisent les mêmes effets et cette Type 3 se révèle être le foudre de guerre des petites sportives. Elle dame le pion à toutes ses concurrentes sur le terrain des reprises et sur l’anneau de vitesse. Afin de promouvoir l’image de la Polo en général, et mieux faire connaître la G40, Volkswagen organise des courses de cup Type 3 au Portugal et en Angleterre. Une série limitée spéciale, « Genesis », du nom du groupe de Phil Collins sera construite à 275 unités, vendues en Suisse, en Allemagne, et au Benelux. Une fois de plus force est de constater que de nombreuses Type 3 ont reçu une préparation compresseur et n’ont plus grand chose à voir avec les modèles d’origines. Ces préparations parfois démoniaques peuvent tomber le 0-100 en moins de 7s, et pour certaines moins de 6s selon les saisons. Les G40 sont des tractions pures, et leur point faible reste le démarrage. Une fois lancée, les accélérations sont brutales, et les reprises chronométrées à des temps insoupçonnées. Ces voitures tirent leur potentiel de deux facteurs : leur légèreté et leur réactivité instantanée, servie par le compresseur et une boîte de vitesse très maniable et bien étagée. Leur conception globale « brut de fonderie » en font des voitures à très hautes sensations, qui ne sont pas sans rappeler le karting.

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Le plus grand regret des fans reste l’abandon définitif du compresseur G, et lorsque vous en connaîtrez les raisons, vous vous verserez aussi dans l’amertume. Les coûts de productions sont l’une des raisons principales, mais il y en a d’autres et pas des moindres.

La première est la méconnaissance du compresseur G chez les utilisateurs. Le compresseur G est une mécanique fiable et robuste, mais requiert des conditions d’utilisations drastiques. Volkswagen a conçu le G60 sur la base du G40 et en a équipé presque toute sa gamme. A la seule différence que le compresseur G60 est un compresseur inertiel sensible à la moindre utilisation inadéquate. Une utilisation inadéquate du G40 conduit à une baisse de performance la plupart du temps, alors qu’une mauvaise utilisation du G60 conduit à la casse du compresseur. VW n’a pas eu la prévention nécessaire auprès de sa clientèle, et s’est vite retrouvé avec des clients qui cassaient du compresseur G60 à tour de bras par méconnaissance des conditions d’utilisations. Le compresseur G a vite reçu, à tort, une réputation de machine fragile, alors qu’il n’en est rien. On voit régulièrement des G40/G60 d’origine tenir 300 000km et plus encore.

La dernière raison est la mise en production du moteur VR6 dont les coûts de développement devaient être amortis et qui présentait une alternative sportive pour la gamme. Il a été question pendant les années 1993-1994 se sortir une Type 4 G40 sur la base d’un petit coupé, qui n’était pas sans rappeler les formes du Corrado. Ce projet n’a jamais vu le jour et l’on ne connaît pas non plus la motorisation qui lui était destiné, ni le poids final. Il ne reste qu’un croquis avorté, qui était plus que prometteur…